Histoire d'amour en gris et jaune
Publié le 22 Novembre 2015
Il était une fois un châle gris et jaune qui s'ennuyait dans un tiroir de commode. Oh certes, il n'était pas tout seul. Il ne manquait pas de compagnie, entouré d'une multitude de petites pièces (châles, cols, étoles...) mais il se demandait sans cesse pourquoi il ne sortait jamais, lui?
Il luttait vaillamment pour ne pas être enseveli sous ceux des habitants du tiroir qui, eux, sortaient souvent, parce qu'ils avaient des jolies petites tenues à accompagner. Lui, il n'avait vraiment jamais eu de chance: la petite tunique estivale avec laquelle il allait à merveille avait fini dans une poubelle grecque, quasi en lambeaux. Oui, je sais, aller remplir les poubelles des Grecs de mes vestiges vestimentaires n'est pas une manière d'aider les Grecs, mais bon, on n'a pas toujours le choix!
Donc, le petit châle s'ennuyait - gris d'ennui, et aussi, souvent, jaune de jalousie, car on s'aîgrit à être délaissé.
Mais un jour, soudain, l'achat (chez Natacha) de 50 cm d'un adorable tissu (Soft cactus) par sa maîtresse alluma une lueur d'espoir car il se trouvait que ce tissu était jaune et gris, et super joli:
Il se voyait bien un avenir avec ce tissu, et encore plus avec la tunique qui fut confectionnée, une tunique toute en jaune et gris (et en tissus du stock, qui plus est...)
Lorsque la propriétaire de la tunique l'eut enfilée, ravie, sur un haut rayé gris et blanc et un pantalon gris, elle s'esclaffa, horrifiée: "Ciel, le froid arrive, mon pauvre cou est à découvert, vite, emmitouflons-le!". Et elle fouilla dans son stash de laine et vite fait bien fait, trouva une grosse pelote de laine jaune (de chez Ardelaine) et dérechef confectionna un col:
Et le pauvre châle gris et jaune demeura dans son tiroir de commode, ruminant sa déception... Il dépérit, se ratatina, s'affaissa et sombra dans les limbes de l'oubli.
Oh non, fin est trop triste. Je recommence:
Mais le col était trop ocré, tirait trop sur le moutarde. Pas de doute, il jurait avec le petit bout de tissu jaune d'or qui ornait le bas de la tunique. La pensée revint alors à la couturière d'un châle: "N'aurais-je point dans mon tiroir un petit châle qui ne va plus avec rien? " Et le petit châle jaune et gris fut tiré du tiroir - et de l'oubli - et prit sa place méritée dans l'accord parfait des jaunes et des gris...
Et le col?, me demanderez-vous.
Le col alla prendre la place du châle dans le fond du tiroir, désespéré de n'avoir jamais été avec rien....
Oh non, pauvre col! Ce n'est pas très gai, ça, comme fin. Je reprends.
Le col fit au fond du tiroir la connaissance d'une ravissante étole violette, et, après qu'il l'eut courtisée un moment et qu'ils se fussent peluchés de concert, ils se marièrent et eurent beaucoup de petites mitaines.
Oh non, c'est par trop niaiseux! Je réécris ma copie.
Le col reconnut que le choix était judicieux et se proposa pour aller à Lyon couvrir le cou d'une petite fille qui n'avait que des écharpes et enluminer un début décembre privé de lumières...
FIN